Le Patriarche Cyrille a rencontré l’ambassadeur de Syrie en Russie
Le 25 mars 2014, le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a reçu à sa résidence de travail l’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République arabe syrienne, Riad Haddad.
Prenaient part à la rencontre l’archimandrite Philarète (Boulekov), vice-président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, et l’archiprêtre Serguiy Zvonariov, secrétaire du DREE aux affaires de l’étranger lointain. Le représentant diplomatique de la Syrie en Russie était accompagné de Nofal Kaltum, conseiller de l’ambassade, ainsi que de J. Arbach.
Accueillant Riad Haddad, le Primat de l’Église orthodoxe russe a souligné l’importance qu’accordait le Patriarcat de Moscou à la situation au Moyen Orient et plus particulièrement en Syrie où des conflits se poursuivent depuis déjà trois ans.
« Nous savons que le résultat de ce conflit est l’exil de plus d’un million d’habitants, tandis que plus 100 000 personnes ont péri, a dit le Patriarche Cyrille. Nous savons que parmi ceux qui ont quitté la Syrie, leur pays natal, beaucoup sont des chrétiens. Nous savons encore qu’il y a beaucoup de chrétiens parmi les victimes. Nous prenons tout autant à cœur la mort des chrétiens et celle des musulmans, nous ne divisons pas les gens suivant leur appartenance religieuse, parce que les souffrances imméritées, injustes, infligées à tout homme nous affligent ».
Le Primat de l’Église orthodoxe russe a remarqué que les chrétiens sont minoritaires, aussi bien en Syrie qu’au Moyen Orient en général, mais la Syrie est en même temps le pays où s’est développé l’une des premières communautés chrétiennes, où les disciples du Christ ont été appelés chrétiens pour la première fois. C’est un pays qui conserve des monuments essentiels de l’histoire chrétienne, il faut partie de cet ensemble que l’on appelle la Terre sainte.
« La disparition et l’affaiblissement de la présence chrétienne signifie une modification d’équilibres culturels et historiques capitaux, a souligné Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie, exprimant la profonde inquiétude que lui inspire la tendance actuelle. « Nous en parlons partout où nous pouvons, de même que de la nécessité de cesser immédiatement toute espèce d’opération militaire sur le territoire syrien. Nous disons aussi que l’on peut et que l’on doit résoudre le problème syrien uniquement de façon pacifique. Malheureusement, les deux tours des conférences de Genève n’ont pour l’instant donné aucun résultat particulier. Il n’y a pourtant pas d’autre voie : il faut s’entendre, il faut résoudre les problèmes en présence pacifiquement » a assuré le Patriarche Cyrille.
Sa Sainteté a insisté sur le fait que les gens qui se donnent le nom d’opposition ont enlevé deux hiérarques chrétiens pendant le conflit, tandis que la supérieure et les sœurs du monastère de Maaloula viennent de rentrer de captivité. Sa Sainteté a demandé à son hôte de transmettre au président syrien sa gratitude pour les efforts déployés par la direction du pays pour la libération des otages, soulignant que le fait même qu’ils aient pu prendre des moniales en otage caractérisait les gens qui avaient osé agir ainsi.
« En tant qu’Église, nous ne nous intéressons pas aux problèmes politiques intérieurs de la Syrie, c’est l’affaire du peuple syrien, a affirmé le Patriarche Cyrille. Je pense que le peuple de ce pays a suffisamment de courage et d’organisation pour résoudre paisiblement les problèmes à l’ordre du jour qui préoccupent une partie de la société syrienne, afin que grâce à ces solutions, la Syrie ouvre une nouvelle page de son histoire. Nous aimerions voir des changements sains et justes dans la vie de la Syrie, mais on ne peut y parvenir par la force, parce que nous voyons parmi ceux qui luttent soi-disant pour des idéaux beaucoup de gens qui sont tout simplement des bandits : ils s’introduisent dans les familles, tuent les gens, prennent des otages ».
Montrant le grand danger que présente aujourd’hui le terrorisme, Sa Sainteté a appelé à une résolution pacifique en Syrie. Pour cela, il faut la volonté du peuple à résoudre ses problèmes sans recours à la violence, l’ouverture de l’état envers ceux qui parlent de la nécessité de réformes et l’écartement des forces extérieures et des mercenaires auxquels est indifférent le sort du pays puisque ils poursuivent leurs propres objectifs.
A cause de trop longs désordres, l’économie syrienne est aujourd’hui dans un état désastreux. Comme cela a été remarqué pendant la rencontre, l’Église orthodoxe russe en partenariat avec la Société impériale orthodoxe de Palestine a envoyé à plusieurs reprises des convois humanitaires. Elle a aussi collecté des fonds qui ont été remis à l’Église orthodoxe d’Antioche, qui se trouve aujourd’hui dans une situation difficile.
Ce thème avait été notamment abordé pendant la visite officielle du Patriarche Jean d’Antioche à l’Église russe. « J’avais accueilli avec joie les remerciements adressés à l’Église et au peule russes, a dit le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie. Je dois dire que nous continuerons à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider le peuple syrien à surmonter ses difficultés, avant tout sur le plan humanitaire, parce que c’est le domaine de l’Église. Nous prions et allons travailler pour que cessent les effusions de sang sur le sol syrien ».
Sa Sainteté a aussi rappelé que le conflit syrien avait été discuté lors de la récente rencontre des Primats des Églises orthodoxes à Istanbul. Une partie importante du Message adopté par les participants est consacré à la Syrie : les signataires s’expriment unanimement sur ce problème.
« J’aimerais exprimer mon soutien au peuple syrien et exprimer l’espoir que le bain de sang cessera en Syrie, ce magnifique pays, à l’histoire si riche, à la culture si remarquable, riche également de ses relations interethniques et interreligieuses. Nous espérons que la paix reviendra et que la vie des habitants, malgré les bouleversements, deviendra encore plus prospère » a conclu Sa Sainteté le Patriarche Cyrille.
L’ambassadeur de la République arabe syrienne, de son côté, a remercié Sa Sainteté de lui permettre de parler sans intermédiaire de la situation de son pays, en particulier de la situation des chrétiens résidant en Syrie. Riad Haddad a souligné que le peuple syrien faisait face aujourd’hui au terrorisme international.
« En Syrie, le christianisme n’est pas un phénomène dû au hasard, c’est l’une des composantes essentielles de la population syrienne, a-t-il dit, rappelant que les chrétiens représentaient environ 10% de la population du pays, avec plus d’un million de fidèles. « Tous observent librement leurs traditions et prient dans des églises réparties sur tout le territoire syrien, a souligné l’ambassadeur. Des chrétiens vivent dans environ 2500 villes et villages. J’aimerais remarquer qu’ils sont tous patriotes ».
Pendant la rencontre, le chef de la représentation diplomatique de Syrie en Fédération de Russie a raconté que durant le conflit armé, 98 églises chrétiennes ont été soit endommagées, soit complètement détruites, tous les biens qu’elles contenaient ayant été volés. 1900 mosquées, 1600 écoles et 60% des hôpitaux syriens ont également été endommagés ou détruits. Tout le matériel médical a disparu des hôpitaux.
Le Patriarche Cyrille a remarqué que ces chiffres témoignaient d’une véritable catastrophe humanitaire.
Le Primat de l’Église russe s’est également dit certain que les évènements en cours ne sauraient briser l’esprit du peuple syrien.
A l’issue de la rencontre, des cadeaux ont été échangés.