Le président du DREE a participé à une conférence sur le prochain concile panorthodoxe
Une conférence scientifique et pratique a eu lieu le 19 avril 2016 à l’Université Saint-Tikhon. Cette conférence, organisée avec la bénédiction de Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie était intitulée « Le Concile panorthodoxe : opinions et attentes ».
Prenaient part à cette manifestation : le métropolite Paul de Minsk et de Sloutsk, exarque patriarcal de toute la Biélorussie, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, le métropolite Georges de Nijni Novgorod et d’Arzamas, l’archevêque Marc de Berlin, d’Allemagne et de Grande-Bretagne, l’archevêque Eugène de Vereïa, recteur du séminaire et de l’académie de théologie de Moscou, président du Comité pédagogique de l’Église orthodoxe russe, l’archevêque Ambroise de Peterhof, recteur des écoles de théologie de Saint-Pétersbourg, vicaire du diocèse de Saint-Pétersbourg, l’évêque Pantéléimon d’Orekhovo-Zouïevo, président du Département synodal aux œuvres caritatives et au ministère social, l’évêque Benjamin de Rybinsk et de Danilov, l’évêque Tikhon d’Egorievsk, secrétaire exécutif du Conseil culturel patriarcal, l’archimandrite Alexis (Polikarpov), supérieur du monastère stavropégique Saint-Daniel de Moscou, l’archimandrite Tikhon (Sekretariev), supérieur du monastère de la Dormition des Grottes de Pskov, l’archiprêtre Nicolas Balachov, vice-président du DREE, l’archiprêtre Vladimir Vorobiov, recteur de l’Université orthodoxe Saint-Tikhon, l’archiprêtre Dimitri Smirnov, président de la Commission patriarcale aux affaires de la famille et à la protection de la maternité et de l’enfance, vice-recteur de l’université Saint-Tikhon, l’archiprêtre Pavel Khodinski, doyen de la faculté de théologie de l’Université Saint-Tikhon, d’autres représentants de l’Université Saint-Tikhon, V. Legoïda, président du Département aux relations de l’Église avec la société et les médias, ainsi que le premier vice-président de ce département, A. Chtchipkov, des membres du clergé, des enseignants et différentes personnalités.
Le métropolite Georges de Nijni Novgorod et d’Arzamas a énoncé le programme de la conférence. L’hiérarque a constaté que le prochain Concile panorthodoxe ne pouvait pas ne pas susciter l’intérêt des fidèles. A la veille d’un évènement historique de cette portée, il est important de parvenir à la plus grande unanimité et à la plus grande concorde possible au sein de l’Église orthodoxe russe sur les questions ayant trait au Concile.
Ensuite, le métropolite Paul de Minsk et de Zaslavl a prononcé un discours d’ouverture. Remarquant que le thème de la conférence inquiétait beaucoup de gens, le métropolite a constaté que la majorité des clercs étaient toutefois bien disposés envers le prochain Concile. L’objet de la présente rencontre était de répondre aux questions qui se posent aux fidèles, d’expliquer l’importance et le sens du Saint et Grand Concile de l’Église orthodoxe.
Le métropolite Hilarion de Volokolamsk a présenté un exposé sur « la position de l’Église orthodoxe russe dans la préparation du Concile panorthodoxe ».
Ensuite, l’archevêque Marc de Berlin et de Grande-Bretagne a proposé un exposé intitulé « Du message du Synode de l’EORHF aux clercs et aux fidèles au sujet de la publication des documents du Concile panorthodoxe ».
Le diacre Fiodor Choulga, du DREE, a expliqué à l’assemblée quelles discussions suscitait la préparation du Concile panorthodoxe dans les Églises orthodoxes locales. Le diacre Pavel Ermilov, vice-doyen de la faculté de théologie de l’Université Saint-Tikhon a présenté un panorama des opinions sur le prochain évènement.
Le métropolite Hilarion a ensuite commenté :
« J’ai écouté attentivement les exposés des intervenants, et j’aimerais faire quelques remarques et donner quelques éclaircissements.
En effet, lorsqu’on parle du Concile panorthodoxe, on est souvent amené, volontairement ou non, à établir une analogie avec les Conciles œcuméniques. Mais, comme l’a justement remarqué le dernier intervenant, cette analogie n’est pas tout à fait opportune, dans la mesure où les Conciles œcuméniques étaient convoqués dans des conditions différentes pour discuter de thèmes complètement autres. Leurs résultats ont été aussi tout à fait différents.
Le Concile œcuménique n’est pas un organe de direction régulier dans l’Église orthodoxe. Il s’agit chaque fois d’une réunion exceptionnelle. Chaque Concile œcuménique a été convoqué au sujet d’une hérésie qu’il était nécessaire de réfuter. Il se terminait par la mise à l’écart de ceux qui défendaient l’opinion condamnée par le Concile.
Effectivement, chaque évêque participant aux Conciles œcuméniques disposait d’une voix, et les décisions étaient le résultat d’un vote. Mais le nombre de participants n’avait pas été limité. Ceux qui le voulaient et le pouvaient venaient participer au Concile. Il est arrivé que certains ne soient pas arrivés à temps et aient ensuite contesté les décisions conciliaires.
Nous avions dès le départ proposé de rassembler tous les évêques. Les votes auraient alors permis d’exprimer l’opinion du plus grand nombre. On nous a répondu qu’il était impossible de rassembler une si grande quantité d’évêques, qu’il valait mieux fixer un nombre d’hiérarques représentant chaque Église. On a d’abord proposé le chiffre de 12, puis celui de 20, et l’on s’est finalement arrêté à 24 évêques. Cela signifie que certaines Églises seront représentées par tous leurs évêques, tandis que chez d’autres, comme dans notre Église, qui compte environ 350 évêques, seule une part insignifiante participera au Concile. Dans ces conditions, la seule solution possible, sur laquelle nous avons insisté, était que chaque Église dispose d’une voix, et non chacun des membres des délégations. Autrement, le consensus panorthodoxe aurait été complètement faussé. Nous ne pouvons pas aller au Concile si des décisions qui ne seront pas reçues par notre Église risquent d’y être prises.
Il a aussi été proposé que les hétérodoxes ne soient pas seulement observateurs, mais aussi répondants. Or, dans les conditions actuelles de nos relations avec les chrétiens hétérodoxes, nous ne pouvons pas nous référer aux précédents de l’époque des Conciles œcuméniques. La dogmatique orthodoxe en était alors encore au stade de la clarification terminologique : sur certaines questions, il n’y avait pas encore de solution communément admise, qui aurait été immédiatement acceptée de tous. C’est pourquoi ces Conciles avaient été convoqués, c’est pourquoi on y disputait, c’est pourquoi différents groupes se sont à leur suite séparés de l’Église.
La situation est différente, aujourd’hui. La doctrine de l’Église orthodoxe est déjà formulée. Nous savons parfaitement où est l’Orthodoxie et où est l’hérésie. Une autre chose est de savoir s’il faut absolument à tout moment rappeler à ceux qui professent des opinions erronées ou hérétiques qu’elles en sont. Si nous parlons de dialogue, le dialogue présuppose le respect d’un certain code de politesse. Même l’apôtre Paul, lorsqu’il est venu à l’aréopage d’Athènes n’a pas dit : « Vous êtes des païens, des athées, vous adorez des idoles. » Il a dit aux Athéniens : « A tous égards vous êtes, je le vois, les plus religieux des hommes. Parcourant en effet votre ville, et considérant vos monuments sacrés, j’ai trouvé jusqu’à un autel avec l’inscription « au dieu inconnu ». Eh bien ! ce que vous adorez sans le connaître, je viens, moi, vous l’annoncer » (Ac 17, 22-23). Il s’agit d’une approche missionnaire, dont on peut attendre un certain succès. Quoique, remarquons-le, l’apôtre Paul n’a pas réussi à l’aréopage athénien, mais le succès est venu plus tard. La mission exige que nous dialoguions, sans pour autant en aucun cas abdiquer de ses propres positions.
Les documents qui ont été discutés aujourd’hui pendant cette conférence contiennent effectivement plusieurs formules que nous aimerions améliorer. Croyez-moi, nous avons employé tous nos efforts pour que ces documents soient meilleurs qu’ils étaient au départ. Mais, comme je l’ai dit dans mon exposé, nous n’avons pas réussi partout : certains de nos amendements n’ont pas été entendus ni adoptés. C’est pourquoi, si nous pouvons aujourd’hui formuler des amendements concrets aux textes, nous aurons encore une fois la possibilité de les présenter au Concile panorthodoxe. Ce sera probablement le Patriarche Cyrille en personne qui le fera pendant l’assemblée des Primats, prévue pour le 17 juin, juste avant le Concile.
Enfin, j’aimerais souligner la question fondamentale, soulevée dans les exposés, du statut du Concile et des documents conciliaires. Dans l’histoire des Conciles œcuméniques, on constate que ces derniers ont reçu cette dénomination post-factum, grâce au consensus des Églises locales. De fait, il y a eu des conciles, annoncés comme œcuméniques, que l’Église a par la suite qualifiés de brigandage : c’est le concile de 449, c’est le concile de Ferrare-Florence, auquel ont assisté les représentants de différentes Églises qui ont signé l’union, tous, sauf un seul homme, Marc d’Éphèse. Ensuite, ils sont rentrés et ils ont compris leur erreur. Les Églises orthodoxes locales, les unes après les autres, ont rappelé leur signature. Finalement, toutes l’ont ont rappelée. Nous savons aujourd’hui que ce ne fut pas un concile œcuménique, bien que les catholiques lui donnent ce titre. Quant au Concile panorthodoxe, nous ne pouvons attendre que soit créé un organe quelconque qui en imposerait les décisions aux Églises. La réception des décisions du Concile panorthodoxe est un problème clé. Cette réception a lieu dès maintenant, et, comme nous le voyons, elle n’est pas évidente. Les documents ont été publiés, ils suscitent une certaine critique venant de différents côtés, de différentes Églises locales, et on saurait l’ignorer.
Je ne parle pas des provocations diffusées pour faire vaciller l’unité de l’Église, j’en ai parlé dans mon exposé. J’ai en vue la critique théologique tout à fait sérieuse et constructive qui émane d’hiérarques, de théologiens, telle, je l’espère, qu’elle se fera entendre pendant la conférence d’aujourd’hui. Je pense que cette critique est importante pour que les décisions qui seront prises au Concile ne suscitent pas le rejet de nos fidèles. Mieux vaut entendre ces remarques critiques maintenant et y réagir, mieux vaut les présenter au Concile panorthodoxe que de laisser cette vague déferler après le Concile. »
Ensuite, les participants de la conférence ont librement discuté les questions soulevées. Une résolution finale a été adoptée à la fin de la conférence, qui sera présentée à Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie.