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Déclaration du Service de communication Du Département des relations ecclésiastiques extérieures Du Patriarcat de Moscou

Le Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou proteste vigoureusement contre les déclarations de l’archevêque suprême de l’Église gréco-catholique ukrainienne, Mgr Sviatoslav Chevtchouk, faites à l’agence catholique autrichienne « Kathpress » dans une interview. Comme tant d’autres interventions de cet hiérarque, cette interview se distingue par son agressivité contre l’Église orthodoxe russe, par ses attaques contre l’Église orthodoxe ukrainienne canonique, par une évaluation politisée de la tragédie qui se déroule actuellement en Ukraine, et par ses outrages à l’adresse du Patriarche de Moscou et de toute la Russie.

A une époque où orthodoxes et catholiques s’efforcent à différents niveaux d’ajuster leur dialogue, les déclarations du chef de l’EGCU résonnent de façon tristement dissonante dans la recherche commune de la consolidation de l’entente mutuelle, visant à surmonter les malentendus et les différents accumulés depuis des siècles. L’uniatisme, en la personne de son premier hiérarque en Ukraine, apparaît une fois de plus comme une séquelle malheureuse d’un passé où catholiques et orthodoxes ne se regardaient pas comme alliés, mais comme concurrents.

Dès 1990, les membres de la Commission spéciale pour le dialogue orthodoxe catholique ont adopté une déclaration sur l’uniatisme, affirmant notamment que l’uniatisme : « ne peut plus être acceptée ni en tant que méthode à suivre, ni en tant que modèle de l’unité recherchée par nos Églises ». Il a été constaté que les tentatives de restauration de l’unité entre les Églises d’Orient et d’Occident au moyen de l’union n’ont fait qu’aggraver les divisions existantes (« L’uniatisme, méthode d’union du passé, et la recherche actuelle de la pleine communion ». Balamand, 1993, paragraphes 2, 12, 9).

Malheureusement, la condamnation commune de l’uniatisme par les orthodoxes et les catholiques dans le cadre du dialogue théologique officiel n’a nullement influé sur la rhétorique des leaders uniates, qui reste toujours aussi hostile à l’Orthodoxie que dans les siècles passés.

Ce n’est pas la première fois que l’archevêque Sviatoslav tente d’opposer deux peuples frères, les peuples ukrainien et russe. Les idées d’un nationalisme étroit lui sont probablement plus proches que l’esprit évangélique contenu dans les lettres de l’apôtre Paul, lequel affirmait qu’en Christ, « il n’y a ni hellène, ni juif » (Col 3, 11).

A la suite des schismatiques de tous bords, le chef de l’EGCU s’attaque ouvertement à l’Église orthodoxe ukrainienne, affirmant que « les douleurs et les souffrances endurées par le peuple ukrainien à cause de la guerre » ne sont pas « l’affaire de l’EOU » : « C’est pourquoi les gens simples s’interrogent : si cette Église s’abstrait de son peuple et parle en juge extérieur ou en médiateur, avec qui est-elle ? Comment une Église qui prétend être l’Église orthodoxe locale de ce peuple, peut-elle se détacher de ce qui a trait à sa vie ou à sa mort ? »

Ces paroles mensongères sont adressées à l’Église à laquelle appartiennent la majorité des croyants ukrainiens, la seule Église orthodoxe canonique en Ukraine, comme cela a été déclaré à de nombreuses reprises, y compris ces tous derniers temps, par les primats des Églises orthodoxes locales.

L’Église orthodoxe ukrainienne partage entièrement la douleur et les souffrances de ses ouailles, tant à l’Est, qu’à l’Ouest du pays. Elle considère les fidèles que Dieu lui a confiés comme des personnes vivantes qu’elle conduit au Christ, indépendamment de leurs opinions et de leurs préférences politiques. Elle a conscience d’avoir l’obligation d’aider les malheureux, ceux qui sont perdu leur toit et sont privés des conditions de vie élémentaires, qui ont perdu des proches ou été gravement blessés, quel que soit le parti politique auquel ils appartiennent. Le souci principal de l’Église orthodoxe ukrainienne dans les conditions actuelles reste d’appeler à la paix et au dialogue national, à prier ardemment pour la Patrie qui souffre, comme en a témoigné à de nombreuses reprises Sa Béatitude le métropolite Onuphre de Kiev et de toute l’Ukraine.

Le chef de l’EGCU refuse de reconnaître le patriotisme de l’Église orthodoxe ukrainienne pour la seule raison qu’elle reste fidèle au Patriarche de Moscou et de toute la Russie. Le leader uniate n’hésite pas à s’attaquer directement au Patriarche : « Le Patriarche de Moscou a beau prétendre être Patriarche de toutes les Russies, et non pas seulement de la Russie, dans le contexte actuel il n’y réussit visiblement pas. Même les fidèles de l’EOU mettent en doute leur droit moral à lui représenter les « douleurs et les joies » du peuple d’Ukraine, considérant leur Patriarche comme un « patriarche agresseur ». »

Ces assertions du premier hiérarque uniate non seulement contreviennent à l’étiquette internationale mise en place ces dernières décennies, qui interdit ce genre d’attaques révoltantes dans l’espace médiatique ; elles sont profondément offensantes pour les millions de fidèles orthodoxes de différentes nationalités que réunit l’Église orthodoxe russe, et qui font mémoire de leur Patriarche à chaque office.

C’est justement la fidélité à leur Patriarche de ces fidèles orthodoxes ukrainiens, ces mêmes « gens simples », ces « fidèles de l’ÉOU » au nom desquels l’archevêque Sviatoslav se croit autorisé à parler, qui est l’argument le plus convaincant contre la calomnie qu’il profère. Cette fidélité n’est pas la conséquence du jeu politique. Elle découle de la conscience de la parenté spirituelle qui prend sa source au baptistère du prince Vladimir, plus solide que les modes du temps, qui unit les fidèles orthodoxes de la Sainte Russie par-delà les frontières, par-delà les différences de nationalité, de race, etc. Aujourd’hui, non seulement des Slaves, mais encore bien d’autres peuples parmi lesquels l’Église orthodoxe russe exerce sa mission, sont héritiers du baptistère de Vladimir.

La déclaration du chef de l’EGCU comme quoi l’Église orthodoxe russe ne se préoccuperait que « des chagrins et des joies » du peuple russe est tout aussi mensongère et offensante que les attaques contre le Patriarche de Moscou et de toute la Russie. Le Patriarcat de Moscou est une Église multinationale et supranationale, elle unit les fidèles orthodoxes de Russie, d’Ukraine, de Biélorussie, de Moldavie, de cinq états d’Asie centrale, des trois états baltes, du Japon, de la Chine, sans même parler des millions de fidèles de la diaspora, dispersés sur tous les continents et parlant tant de langues différentes.

La rupture du lien historique entre Moscou et l’antique Kiev, « d’où est sortie la terre russe », est devenue le slogan à partir duquel, au début des années 1990, un schisme s’est produit en Ukraine. L’argumentation employée par le chef de l’Église gréco-catholique ukrainienne reprend les arguments des schismatiques. Discourant sur la nécessité de reformater l’ordre canonique établi dans le monde orthodoxe, les leaders de l’uniatisme et du schisme font dépendre la « création » d’une Église orthodoxe nationale en Ukraine (comme si cette Église n’existait pas déjà) de la séparation de l’Église orthodoxe ukrainienne d’avec le Patriarcat de Moscou.

En même temps, l’archevêque Sviatoslav affirme que « l’analogie entre l’union de l’EGCU avec le Souverain Pontife et l’unité de l’EOU avec le Patriarche de Moscou est pour le moins malheureuse ». Effectivement, il est difficile d’établir une analogie directe, dans la mesure où la dépendance de l’EGCU du Saint Siège est bien plus directe et plus immédiate que la dépendance de l’EOU avec le Patriarcat de Moscou, qui est purement spirituelle.

L’Église orthodoxe ukrainienne est une Église auto-administrée ; d’un point de vue administratif et financier elle est indépendante du Patriarcat de Moscou. Les évêques de cette Église sont élus par son Saint Synode sans la sanction de Moscou. Le lien spirituel entre l’Église orthodoxe ukrainienne et le Patriarcat de Moscou s’exprime uniquement dans la mention du nom du Patriarche dans les paroisses, et dans le fait que le Patriarcat, conformément aux statuts de cette Église, confirme l’élection de Sa Béatitude le métropolite de Kiev et de toute l’Ukraine.

Le même droit appartient au Pape de Rome, qui confirme dans ses fonctions le chef nouvellement élu de l’Église gréco-catholique ukrainienne. Cependant, le Pape dispose d’un pouvoir ô combien plus étendu sur l’EGCU que le Patriarche de Moscou et de toute la Russie sur l’Église orthodoxe ukrainienne. Conformément à la constitution dogmatique « Pastor aeternus » du Concile Vatican I, dont les décisions sont valables pour tous les catholiques, « l’Église de Rome dispose de la primauté de pouvoir ordinaire », et « le pouvoir du Pape de Rome, étant épiscopal, s’exerce directement. Les pasteurs de tout ordre et de tout rite, et les fidèles, chacun en particulier et tous ensemble, lui sont soumis hiérarchiquement et lui doivent vraie obéissance, non seulement dans les questions touchant à la foi et à la moralité, mais également dans celles ayant trait à l’ordre et à l’administration dans l’Église qui s’étend dans le monde entier ».

Suivant la logique des allégations de l’archevêque Sviatoslav, pour être une Église vraiment nationale et patriotique, l’EGCU devrait avant tout se séparer du Pape de Rome, dont le chef de l’EGCU a récemment publiquement critiqué la position sur la situation en Ukraine, comme « ne correspondant pas à la réalité ». Les réflexions de l’archevêque Sviatoslav témoignent de l’emploi du double standard : de son point de vue, l’Église orthodoxe ukrainienne, qui n’entretient qu’une unité spirituelle, dans la prière, avec le Patriarcat de Moscou, doit s’en séparer afin d’obtenir le droit d’être appelée nationale et patriotique, tandis que l’EGCU, qui dépend administrativement parlant directement du Pape de Rome, n’a nullement besoin de s’en séparer.

La hiérarchie du Patriarcat de Moscou a toujours estimé important qu’un vrai dialogue se maintienne entre l’Église orthodoxe ukrainienne et l’EGCU, nécessaire avant tout pour la restauration de la paix en Ukraine, pays qui a tant souffert. Cependant, le succès de ce dialogue n’est possible qu’à la condition que cesse toute rhétorique visant à enflammer la haine entre nations et entre confessions. Le Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou exprime son sincère espoir que le Primat de l’Église gréco-catholique d’Ukraine renoncera à l’avenir à semblable rhétorique.

Nous prions le Seigneur très-miséricordieux d’envoyer au plus tôt la paix tant attendue et la concorde à la terre d’Ukraine durement éprouvée.

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