Le patriarche Cyrille a rencontré le président de l’Association Billy Graham, F. Graham
Le 5 mars 2019 à la résidence patriarcale et synodale du monastère Saint-Daniel de Moscou, le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a rencontré le président de l’Association évangéliste Billy Graham, Franklin Graham.
Le vice-président de l’Association Billy Graham, Victor Hamm, prenait part à la rencontre, ainsi que le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, et l’archimandrite Philarète (Boulekov), vice-président du DREE.
Accueillant son visiteuer, le primat de l’Église orthodoxe russe a mentionné leur précédente rencontre, en octobre 2015. « Depuis, le monde a beaucoup changé, et on ne peut pas dire que ce soit en mieux, a constaté avec regret le patriarche Cyrille. Je pense que plus les relations deviennent difficiles, notamment entre nos pays, plus la responsabilité des chrétiens devient grande, s’agissant d’améliorer le monde. Les chrétiens ont ce potentiel, et ils doivent le réaliser, le mettant particulièrement en œuvre lorsque les choses deviennent difficiles. »
Sa Sainteté a aussi rappelé que le père de Franklin Graham, le fondateur de l’Association évangéliste Billy Graham, était venu en Russie à l’époque soviétique, lorsque les relations entre l’URSS et les États-Unis étaient tendues. « Le docteur Billy Graham était l’ami de l’Église orthodoxe russe. Nous gardons de lui un bon souvenir. Nous vous exprimons une fois encore nos condoléances » a déclaré le patriarche à son fils.
« Hier, vous avez visité notre Institut des Hautes-Études, où vous avez participé à une table ronde sur le rôle pacificateur des chrétiens dans le contexte des conflits globaux et locaux d’aujourd’hui », a poursuivi Sa Sainteté, soulignant encore une fois que plus le contexte politique devient difficile, plus les croyants doivent prendre leurs responsabilités, s’engageant, participant à la vie de la société et s’efforçant d’obtenir des changements positifs.
« Je souhaite revenir encore une fois aux années terribles de la « guerre froide ». A l’époque, il a été possible de changer la situation, notamment grâce à l’engagement des chrétiens d’Orient et d’Occident, de l’Union soviétique et des États-Unis. C’est pourquoi je suppose qu’il est temps d’unir nos efforts pour la paix » a dit le patriarche.
Durant la suite de l’entretien, le patriarche Cyrille a évoqué le problème des valeurs spirituelles et morales dans la société contemporaine, dont l’état ne peut pas ne pas inquiéter les chrétiens. Selon son témoignage, au cours du vingtième siècle, durant les années de la « guerre froide », c’est précisément « la préoccupation de l’état moral de la société » qui a été l’un des facteurs permettant d’établir de bonnes relations entre l’Église orthodoxe russe et le monde chrétien occidental. « L’attachement à la notion chrétienne du mariage, de la famille, de la dimension sacrée de la vie humaine dès l’instant de la conception, est une position de principe essentielle, partagée par l’Association évangélique Billy Graham et par vous personnellement, que soutient indéfectiblement l’Église orthodoxe russe » a déclaré le primat.
La morale a toujours été le fondement de l’existence humaine, a assuré Sa Sainteté. Selon le patriarche, la lutte pour l’intégrité de la personne humaine est à l’heure actuelle un défi d’importance pour les chrétiens. « Mais, malheureusement, les chrétiens sont aussi divisés sur ces questions. C’est pourquoi il est si important que les chrétiens qui sont d’accord sur le principe qu’il faut résoudre ces problèmes, mettent en place un système de collaboration et d’interaction » a dit le patriarche.
Le primat de l’Église russe a aussi constaté avec regret que l’un des principaux problèmes de la société russe, dont l’Église orthodoxe russe s’occupe activement, est l’avortement.
« En 2016, vous avions lancé une pétition pour demander que l’avortement ne soit plus financé par le système de sécurité sociale. En effet, les gens qui ne sont pas d’accord avec la pratique de l’avortement, et ils sont nombreux, doivent soutenir de leurs impôts le paiement de ces procédures. Cette pétition a été signée par plus d’un million de personnes dans le pays » a raconté Sa Sainteté.
Selon lui, l’Église orthodoxe russe soutient aujourd’hui toutes les mesures prises pour limiter le nombre d’avortements dans le pays : « Les représentants de l’Église proposent des consultations dans les établissements où les femmes viennent avorter. Là où cela est possible, nos consultants (généralement des femmes), rencontrent celles qui veulent avorter avant qu’elles aient pris une décision définitive. »
Le primat de l’Église russe a constaté que l’une des causes les plus fréquentes, incitant les jeunes femmes à avorter, est le manque de soutien, non seulement financier, mais aussi moral, lorsque les parents, par exemple, insistent pour qu’elles avortent, si l’enfant a été conçu hors mariage.
« C’est pourquoi j’appelle l’épiscopat de notre Église non seulement à lutter verbalement contre l’avortement, mais à aider à améliorer les conditions de vie des femmes qui, sous l’influence de nos services, refusent d’avorter. J’ai proposé aux hiérarques de créer des refuges diocésains pour les femmes qui n’ont pas où aller après la naissance, où bien qui risquent d’être confrontées à une violente critique de la part de leur famille. Pour cette catégorie de femmes, nous ouvrons des refuges, afin qu’elles puissent y vivre autant qu’elles le veulent, une semaine, deux, trois, un mois ou même plus. Ensuite, nous nous efforçons de les aider à trouver un travail et à subvenir à leurs besoins et à ceux de leur enfant. Semblables refuges existent déjà dans la majorité des diocèses. »
Le patriarche Cyrille a mentionné avec gratitude le travail commun de l’Église orthodoxe russe et de l’Association évangéliste Billy Graham pour l’organisation d’une aide humanitaire aux réfugiés ukrainiens. « En 2015, nous avions réalisé ensemble un projet humanitaire pour aider les victimes du conflit armé à l’Est de l’Ukraine. Nous avions reçu une grande quantité de lots humanitaires, qui ont été distribués aux nécessiteux. »
Le primat de l’Église orthodoxe russe a aussi remercié Franklin Graham d’avoir organisé le Sommet mondial pour la défense des chrétiens persécutés, en 2017, à Washington. « De même que ma rencontre avec le pape François, en février 2016, le Sommet a attiré l’attention de la communauté internationale sur le problème des persécutions contre les chrétiens » a souligné Sa Sainteté.
Le patriarche Cyrille a évoqué l’aide humanitaire en direction des Syriens : « En avril 2017, avec ma bénédiction, un Groupe de travail interreligieux pour l’aide humanitaire à la population de la Syrie a été créé dans le cadre du Conseil présidentiel pour l’interaction avec les associations religieuses. Des chrétiens et des musulmans en font partie. L’aide est distribué dans les églises et les mosquées par des chrétiens et par des musulmans de Syrie et de Russie. »
« Notre Église a aussi été l’instigatrice d’une aide aux enfants invalides de guerre. Un groupe de médecins experts russes s’est rendu dans les camps de réfugiés syriens au Liban, a examiné les enfants ; un grand nombre d’enfants de familles syriennes et d’orphelins ont été transportés en Russie pour y être soignés. »
Selon le patriarche Cyrille, en travaillant en Syrie, l’Église orthodoxe russe a établi des liens de confiance précieux avec les représentants de l’état syrien et avec les militaires russes en Syrie, ce qui lui permet de réaliser son action humanitaire le plus efficacement possible. Sa Sainteté a aussi affirmé que l’Église orthodoxe russe et l’Association évangéliste Billy Graham, qui possède une immense expérience d’aide aux chrétiens dans différentes régions du monde, pourraient unir leurs efforts pour réaliser des projets communs au Proche-Orient.
« Il y a beaucoup d’endroits du monde où les gens souffrent. C’est un défi adressé à notre conscience chrétienne. Là où il le faut, nous devons unir nos efforts pour porter aux hommes le réconfort et la paix, pour aider ceux qui souffrent » a résumé le primat de l’Église orthodoxe russe.
De son côté Franklin Graham a remercié le patriarche Cyrille de l’avoir reçu et l’a félicité du 10e anniversaire de son intronisation.
Il a déclaré soutenir la position de l’Église orthodoxe russe sur l’avortement, qu’il a qualifié d’un « des plus grands péchés » du monde contemporain.
« Votre idée de créer des refuges pour les femmes et pour leurs enfants est excellente. Certaines organisations, aux États-Unis, ont aussi mis en place des projets semblables. Cela a permis de sauver de nombreuses vies » a dit le président de l’Association évangéliste Billy Graham.
Parlant des différents domaines de coopération interchrétienne, F. Graham a, notamment, mentionné la nécessité d’œuvrer ensemble pour aider les réfugiés de Syrie. « Hier, nous en avons discuté avec le métropolite Hilarion. Nous avons chercher le moyen de collaborer pour aider les enfants victimes de la guerre en Syrie. Nous avons beaucoup d’expérience dans ce domaine. Nous comprenons ce qu’il faut faire » a déclaré F. Graham.
Le président de l’Association Billy Graham a aussi proposé d’organiser à Moscou un nouveau Sommet pour la défense des chrétiens persécutés. « Le Sommet de 2017, pour la défense des chrétiens persécutés, à Washington, a été un grand succès. Mais il faut continuer, car le sujet des persécutions contre les chrétiens reste d’actualité » a souligné Franklin Graham.