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Le métropolite Hilarion : Il faut poursuivre le dialogue avec l’Église catholique romaine

Le 25 octobre 2014, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, qui anime l’émission « L’Église et le monde » (Tserkov’ i mir) sur la chaîne de télévision « Vesti-24 », a reçu le commentateur politique et spécialiste des religions Matfeï Popov.

Le métropolite Hilarion : Frères et sœurs, bonjour. Vous regardez « l’Église et le monde ». Nous parlerons aujourd’hui de nos relations avec l’Église catholique. Dans nos studios, Matfeï Popov, commentateur politique international, spécialiste des religions. Bonjour, Matfeï.

  1. Popov. Bonjour, Monseigneur. Vous êtes rentré récemment du Vatican. Vous y êtes allé pendant la réunion extraordinaire du Synode des évêques de l’Église catholique romaine sur les problèmes de la famille. Quel était l’objet de votre visite ?

Le métropolite Hilarion : Le Synode des évêques se réunit moins d’une fois par an. Il s’agit d’un organe consultatif dépendant du Pape de Rome. Suivant la tradition, ce qu’on appelle des délégués fraternels, c’est-à-dire des délégués des Églises non catholiques, sont invités au Synode.

Le problème de la famille, discuté à l’assemblée du Synode des évêques, se pose avec une acuité particulière à l’Église catholique aujourd’hui. Dans le monde occidental, dans les pays où l’Église catholique a le plus d’influence, nous assistons à des processus législatifs en contradiction radicale avec les représentations de l’Église sur la famille. Il s’agit, évidemment, de la légalisation de différentes formes non traditionnelles de famille, et avant tout des unions homosexuelles.

Par ailleurs, l’Église catholique a de sérieux problèmes avec ceux de ses fidèles qui, par exemple, sont divorcés et veulent se remarier. La doctrine de l’Église catholique n’envisage pas cette possibilité. Des millions de gens qui ont divorcé pour une raison ou pour une autre, non seulement n’ont pas le droit de se remarier, mais ne sont pas non plus admis à la communion.

Ce thème a suscité de vives controverses, car les opinions des évêques présents au Synode se sont avérées très différentes. J’ai cru important de faire partager à nos frères catholiques l’expérience orthodoxe, car nous avons une doctrine du mariage commune. Il ne s’agit pas de doctrine orthodoxe ou catholique, mais de l’enseignement du Christ et des apôtres. Nous insistons sur le fait qu’il n’y doit y avoir qu’un seul mariage, que les époux doivent rester fidèles l’un à l’autre. Mais, en même temps, lorsqu’il s’agit de situations concrètes, nous agissons différemment au niveau pastoral.

Les catholiques me semblent avoir une approche très rigoriste, très juridique. Pour que l’Église reconnaisse la dissolution du mariage, il faut passer par le tribunal ecclésiastique. Et cette reconnaissance n’est possible que dans le cas où l’Église, sur la base d’une enquête, proclame que non seulement ce mariage est annulé, mais qu’il était initialement illégal ou invalide. Seule une très faible proportion de catholiques, pour autant que je sache, est prête à se soumettre à cette procédure.

Nous, orthodoxes, avons une autre idée du mariage. L’idéal, bien entendu, demeure, mais il existe bien des situations différentes dans la pratique. S’il y a eu divorce, nous établissons toujours une différence entre le coupable et l’innocent. Si, par exemple, l’homme bat sa femme et ses enfants, ce mariage constitue une menace pour eux, et le divorce n’est plus seulement une option permise, il devient inévitable. L’Église soutient cette option et donne sa bénédiction à un second mariage pour la partie non coupable.

  1. Popov: Les médias se sont plus particulièrement intéressés à la formulation du rapport de l’Église catholique romaine aux unions homosexuelles. Plusieurs groupes de travail ont été créés qui tentent d’exprimer ce rapport dans différentes langues. La mise en commun de ces tentatives donne la formulation suivante : le chrétien doit rester doux et aimant, le péché est le péché, mais on peut être indulgent envers ceux qui se repentent. Par ailleurs, le fait même que la question des unions homosexuelles ait été introduite à l’ordre du jour du Synode a incité certains médias à affirmer que l’Église catholique se préparait à assouplir sa position sur ce problème.

Monseigneur, vous avez personnellement rencontré les participants du Synode. Certains d’entre eux sont-ils effectivement prêts à changer leurs convictions ?

Le métropolite Hilarion : Je n’ai pas assisté à toutes les réunions des deux semaines qu’a duré le Synode, mais je n’ai pas manqué le moment, important à mon avis, où l’on a lu les rapports des différents groupes de travail, en anglais, français, italien, espagnol. Huit rapports ont ainsi été lus, deux par groupe linguistique. Et cela a démontré à quels points les opinions et les approches différaient. La différence tenant d’ailleurs pour beaucoup au contexte culturel, au pays où tel ou tel évêque remplit ses fonctions. De fait, l’approche que vous appelez conservatrice a prévalu, bien que les voix d’évêques libéraux qui luttent pour un assouplissement de la discipline ecclésiastique se soient fait clairement entendre.

Pratiquement personne, à ce que je sais, n’est intervenu pour soutenir les unions homosexuelles, et ceux qui luttaient pour l’assouplissement parlaient principalement des divorces et de la possibilité du remariage pour ceux qui ont divorcé contre leur gré, ainsi que de la possibilité pour ces personnes de s’approcher du Sacrement de communion. Ce thème a, effectivement, mis de sérieuses divergences en évidence.

Quant aux unions homosexuelles, il me semble qu’il n’y avait pas de sérieuses divergences sur ce point, parce que la doctrine de l’Église est suffisamment claire. L’Église ne peut changer ce qui est considéré comme péché du point de vue de la morale chrétienne et décréter qu’il s’agit d’un comportement normal. Par contre, là encore, la pratique pastorale laisse le champ suffisamment libre au pasteur chrétien. Par exemple, dans les « Fondements de la conception sociale », le document officiel adopté par l’Église orthodoxe russe en 2000, nous faisons une différence entre penchants homosexuels et comportement homosexuel. Nous disons que le comportement est un facteur de péché, à la différence des penchants qui ne sont pas peccamineux en soi. Les personnes qui ne se conduisent pas comme il faut sont appelées au repentir. L’Église accepte leur repentir, tout péché peut être pleuré et ces personnes sont pardonnées.

  1. Popov : Pendant votre voyage, vous avez soulevé le thème des gréco-catholiques à deux reprises. Vous adressant aux participants du Synode, vous leur avez demandé d’appeler la communauté gréco-catholique ukrainienne à se distancier du conflit en cours et à ne pas déchirer plus encore la communauté chrétienne. Ensuite, vous avez de nouveau abordé cette question dans votre entretien avec le Pape François. Peut-on dire que le Vatican a entendu votre position ?

Le métropolite Hilarion : Je pense que le Vatican l’a entendue, mais quant à savoir si quelque chose changera dans nos relations, c’est une autre affaire. Malheureusement, nous sommes confrontés à une situation où il y a d’une part, disons, le Vatican officiel, qui est en dialogue avec nous. Ce dialogue se poursuit à différents niveaux : au niveau théologique, et au niveau de la discussion de problèmes, comme pendant le Synode des évêques.

Mais nous voyons d’autre part que là où les orthodoxes coexistent avec les gréco-catholiques, une énorme tension existe toujours. Cela vient en grande partie de l’engagement politique des gréco-catholiques. Ils défendent une position politique concrète et soutiennent un parti en particulier dans le conflit civil.

Nous ne pouvons l’accepter. L’Église doit rester en dehors de la politique et soutenir les gens indépendamment de leurs orientations politiques. C’est la position que défend l’Église orthodoxe ukrainienne du Patriarcat de Moscou. Pendant tous ces mois terribles et tragiques, depuis le mois de janvier, depuis les affrontements au Maïdan, jusqu’aux évènements en Ukraine de l’Est, elle n’a soutenu aucune des parties en présence. Notre Église compte des fidèles des deux côtés des barricades. Nous voudrions que toutes les communautés religieuses d’Ukraine s’en tiennent à cette position, parce qu’elle seule est capable de contribuer à la réconciliation des gens. Toute autre ne fait que verser de l’huile sur le feu, diviser les gens et, par conséquent, empêche l’apaisement de ce dur conflit.

Nous avons un autre reproche à faire aux gréco-catholiques, auquel, il est vrai, le chef de l’Église gréco-catholique a répondu immédiatement après mon intervention. Je suis satisfait de cette réponse. Il s’agit du fait que ces derniers mois les gréco-catholiques ont soutenu les schismatiques qui se sont séparés de l’Église orthodoxe pour fonder leur propre structure indépendante, et luttent maintenant de fait contre l’Église canonique. Le chef de l’Église gréco-catholique a souvent été vu avec le chef du soi-disant « Patriarcat de Kiev », Philarète (Denissenko), qui est excommunié. Ils sont même allés ensemble en Amérique et ont été reçus ensemble dans les bureaux du Département d’état.

De notre point de vue, une association aussi étroite d’une structure catholique officielle, l’Église gréco-catholique, avec une structure schismatique, contredit pour le moins le protocole des relations interchrétiennes qui s’est mis en place au cours des dernières décennies. Nous n’avons pas de relations avec ceux que nos interlocuteurs considèrent comme schismatiques. Le jour même qui a suivi mon intervention, l’archevêque Sviatoslav (Chevtchouk) m’a donné réponse. Il a dit que l’Église gréco-catholique considérait l’Église orthodoxe ukrainienne du Patriarcat de Moscou comme la seule structure orthodoxe canonique en Ukraine et que ses rapports avec les schismatiques s’établissaient, disons, au niveau civil et dans le cadre du Conseil des églises d’Ukraine, qui rassemble différentes organisations religieuses ukrainiennes.

  1. Popov: Pourquoi avez-vous rencontré le pape Benoît ? Il ne regrette pas d’avoir pris sa retraite ?

Le métropolite Hilarion : Je ne le lui ai pas demandé. Il a maintenant 87 ans. Il a déjà du mal à marcher, mais sa mémoire est excellente. J’ai été content de constater qu’il avait conservé une telle clarté d’esprit malgré son grand âge et une certaine faiblesse physique. Il dit passer la majeure partie de son temps en prière.

J’ai pu voir où et comment il vivait. Il habite une maisonnette relativement modeste au Vatican, sur une colline d’où se découvre une vue magnifique. On y voit d’ailleurs parfaitement bien notre église orthodoxe Sainte-Catherine.

J’avais envie de rendre visite au Pape Benoît d’abord parce que je l’avais rencontré à trois reprises avant sa retraite. D’autre part, j’ai beaucoup de respect pour lui en tant que théologien. J’ai lu récemment son livre Jésus de Nazareth, un ouvrage très important pour le lecteur occidental d’aujourd’hui. En lui rendant visite, je voulais tout simplement lui marquer mon respect. Je ne lui ai naturellement posé aucune question indélicate sur sa démission.

Des affaires ecclésiastiques, du dialogue orthodoxe-catholique et des problèmes actuels j’avais discuté avec le Pape Benoît lorsqu’il présidait la chaire romaine ; aujourd’hui, c’est, bien sûr, avec le Pape François que j’en ai parlé. Je dois dire que le Pape s’est montré compréhensif sur ce que je lui disais.

  1. Popov : Quelle impression vous a laissé votre rencontre avec le Pape François ? En quoi cette rencontre se distinguait-elle des précédentes ?

Le métropolite Hilarion : Lors de chacune de nos rencontres, nous poursuivons la conversation entamée précédemment. Lorsqu’ai rencontré pour la première fois le Pape François, le lendemain de son intronisation, j’ai été satisfait de de voir en lui un homme compétent. On craignait en effet qu’un homme du « Tiers Monde », d’Amérique du Sud, élu au Saint Siège, ne connaisse pas suffisamment la situation et ne dispose pas des informations nécessaires. En fait, il est parfaitement informé, y compris sur des questions aussi délicates que nos relations avec les gréco-catholiques. Cette impression s’est confirmée cette fois encore.

Nous ne pourrons naturellement résoudre tous les problèmes d’un seul coup. Mais je pense qu’il faut poursuivre le dialogue avec l’Église catholique romaine, parce que de telles rencontres, d’une part, nous permettent d’énoncer notre position, d’autre part, d’entendre la réponse. Je pense que le Pape François a une volonté de dialogue avec l’Église orthodoxe. Il est désolé par ce qui se produit actuellement en Ukraine. Et, naturellement, il faut continuer à le rencontrer, ainsi que les autres dirigeants de l’Église catholique romaine.

Merci Matfeï, d’avoir été l’invité de notre émission.

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