Au conservatoire de Moscou, un concert à la mémoire des victimes de la Première guerre mondiale
Le 8 décembre 2014, à la Grande salle du Conservatoire de Moscou Tchaïkovski, était donné un concert-requiem dans le cadre des commémorations du centenaire de la Première guerre mondiale.
Le concert était organisé par la Fondation Saint-Grégoire-le-Théologien avec le soutien du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou et la Représentation de l’Union européenne en Russie. Les auditeurs ont ainsi pu entendre le « Requiem » de G. Verdi.
Saluant le public, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du DREE a dit :
« Chers amis, le monde commémore
cette année le centenaire du début de la Première guerre mondiale. Le bilan de cette guerre qui a duré quatre ans est terrible, des millions de victimes sont à déplorer : plus de dix millions de soldats ont été tués, ainsi que plus de douze millions de civils. Quatre empires ont cessé d’exister en conséquence de cette guerre.
Elle a eu des conséquences à long terme pour la majorité des états impliqués. Sans la Première guerre mondiale, il n’y aurait pas eu le Troisième Reich, ni le national-socialisme, ni les camps de concentration hitlériens, ni les chambres à gaz. Si la Russie ne s’était pas laissé entraîner dans cette guerre, il n’y aurait eu ni bolchévisme, ni famine, ni dékoulakisation, ni répressions de masse.
La principale leçon des guerres du XX siècle est qu’il n’y a pas de vainqueurs dans ces conflits : tous les belligérants subissent d’immenses dommages, et tous sont finalement victimes.
Les spécialistes se demandent encore qui a gagné et qui a perdu la Première guerre. Du point de vue de la forme, c’est l’Allemagne et ses alliés qui ont perdu ; mais peut-on dire que la Russie, par exemple, a gagné cette guerre ? Si à leurs débuts ses opérations militaires ont été un succès, les trois années de guerre qui ont suivi ont tellement épuisé les forces et les ressources du pays, que l’empire est tombé et que les bolcheviks, avec l’aide de l’Allemagne, ont pu prendre le pouvoir presque sans rencontre de résistance, à mains nues.
Pour l’Église, la guerre est un mal et tout meurtre un crime. Mais elle donne cependant sa bénédiction aux soldats qui partent accomplir le devoir sacré de défendre son prochain et de restaurer la justice opprimée. « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » (Jn 15, 13). L’Église applique ses paroles du Christ aux soldats morts au champ d’honneur pour la foi et la Patrie. Elle exalte les exploits des soldats et prie pour que Dieu leur pardonne leurs péchés et leur accorde le repos éternel.
L’Église croit à la résurrection des morts. Le Samedi saint, jour où nous faisons mémoire de la mort et de l’ensevelissement du Christ, on lit à l’église la prophétie d’Ezéchiel sur le champ semé d’ossements (Ez 37, 1-10). Suivant le prophète, les ossements se réunissent un à un, se couvrent de ligaments et de chair, puis Dieu insuffle sur eux l’esprit et des hommes vivants se lèvent en foule. Tous ceux qui sont morts sur les champs de bataille ou dans d’autres circonstances, toutes les victimes innocentes des conflits armés ne sont pas morts pour toujours, ils ressusciteront avec un corps nouveau pour une vie nouvelle. C’est de cette espérance que parlent les prières et les chants des funérailles, tant dans l’Église orthodoxe que dans l’Église catholique.
Nous entendrons aujourd’hui le « Requiem » de Giuseppe Verdi, une œuvre que le grand maître de la musique d’opéra a écrit dans sa vieillesse, après plus de vingt ans de pause. Cette musique est écrite sur un texte latin, elle est empreinte de tristesse pour les défunts et d’espérance dans la résurrection.
Le métropolite a remercié tous ceux qui ont pris part à l’organisation du concert. « L’interprétation que vous entendrez aujourd’hui de cette grande création musicale du maître italien est dédiée à la mémoire de tous ceux qui sont morts pendant la Première guerre mondiale, indépendamment du côté duquel il se battait » a déclaré Mgr Hilarion « C’est pour eux que nous disons les mots qui ouvrent la musique du Requiem et par lesquels je terminerai mon allocution : Donne-leur, Seigneur, le repos éternel et que la lumière éternelle brille sur eux ».
Ensuite, V. Ouchatskas, représentant de l’Union européenne en Russie a remarqué : « Le Requiem que nous allons entendre dans quelque minutes a été interprété pour la première fois à Milan en 1874, exactement 40 ans avant le déclenchement de la Première guerre mondiale. Mais dans cette musique tragique et inquiète, on croirait entendre les grondements du XX siècle tout proche et qui a commencé par une guerre mondiale ». « Cet anniversaire est l’occasion de prier pour le repos des âmes des défunts, mais aussi une occasion de s’interroger sur les leçons de la Première guerre mondiale. La principale, à mon avis, est que la vie humaine est la valeur la plus élevée, plus précieuse que toute ambition géopolitique. C’est la vie du soldat dans les tranchées, la vie de l’infirmière dans un lazaret au front, de l’ouvrier à l’usine ou de l’enfant qui tombe sous un tir d’artillerie. Notre responsabilité commune consiste à ne jamais plus accepter que pareille tragédie ne se répète. L’harmonie de l’orchestre, des chœurs et des solistes, que je remercie de tout cœur, est le symbole de la concorde et de la paix auxquelles nous aspirons dans les relations entre nos pays et entre nos peuples ».
Des représentants des Églises orthodoxes d’Alexandrie, de Jérusalem et de Serbie assistaient au concert.
Des personnalités officielles, des hommes d’état, du monde de la culture ou de la science assistaient au concert, ainsi que des représentants de différentes églises chrétiennes et communautés religieuses étaient présents.
Le « Requiem » était interprété par l’orchestre symphonique académique d’état Svetlanov, le Chœur synodal de Moscou, la chorale Vladimir Minine, la Chapelle académique Yourlov, le Chœur académique Kojevnikov, les solistes Svetlana Kassian (soprano), Stéphanie Irania (mezzo-soprano), Edgaras Montvidas (tenor), Nicolas Courjal (basse). L’ensemble était dirigé par J. Biniamini. La direction artistique était assurée par Alexis Pouzakov.
Le concert avait lieu avec le soutien de la Société historique russe et la Société des chorales russe. Le sponsor principal de l’évènement était la banque « Inteza ».